Si une sanction disciplinaire peut être fondée sur des témoignages anonymisés, l’autorité investie du pouvoir disciplinaire doit, en cas de contestation de leur authenticité dans le cadre d’un contentieux, produire tous éléments permettant de corroborer les faits relatés. 

 

Conseil d’Etat, 05 avril 2023, n°463028

 

Dans cette affaire, une agent contractuelle avait fait l’objet d’une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois, en raison de propos qu’elle aurait tenus alors qu’elle animait une session de formation interne. Il lui était reproché d’avoir dénigré son employeur et ses collègues et d’avoir exprimé des positions sexistes et homophobes.

Cette sanction était fondée exclusivement sur les témoignages des agents ayant assisté à la session de formation, anonymisés à leur demande, ainsi que sur une synthèse également anonymisée.

 

La cour administrative d’appel de Paris, infirmant le jugement rendu par le tribunal administratif de Montreuil, annulait la sanction, en raison du caractère insuffisamment probatoire des éléments produits par l’autorité investie du pouvoir disciplinaire.

 

Saisi en cassation, le Conseil d’Etat jugeait que :

« L’autorité investie du pouvoir disciplinaire peut légalement infliger à un agent une sanction sur le fondement de témoignages qu’elle a anonymisés à la demande des témoins, lorsque la communication de leur identité serait de nature à leur porter préjudice. »

 

Il précisait néanmoins que cette possibilité devait être conciliée avec le droit de l’agent d’accéder aux témoignages formulés à son encontre et indiquait :

« Il appartient [à l’autorité investie du pouvoir disciplinaire] cependant, dans le cadre de l’instance contentieuse engagée par l’agent contre cette sanction et si ce dernier conteste l’authenticité des témoignages ou la véracité de leur contenu, de produire tous éléments permettant de démontrer que la qualité des témoins correspond à celle qu’elle allègue et tous éléments de nature à corroborer les faits relatés dans les témoignages. La conviction du juge se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile. »

 

Or, en l’espèce, le Conseil d’Etat relevait que les éléments anonymisés produits n’étaient pas suffisants pour établir la réalité des faits contestée par l’intéressée et rejetait, en conséquence, le pourvoi formé par l’employeur.