Dans son avis suite à la saisine du Premier ministre sur la question de l’utilisation des drones par la police et les services de secours, le Conseil d’Etat estime nécessaire de fixer un cadre législatif d’utilisation des caméras aéroportées que sont les drones.

Avis du Conseil d’État du 20 octobre n° 401214 rendu public le 13 novembre 2020.

Pour mémoire, le Conseil d’Etat avait estimé en mai dernier que « collecter des données, grâce à la captation d’images par drone, à les transmettre, dans certains cas, au centre de commandement de la préfecture de police pour un visionnage en temps réel et à les utiliser pour la réalisation de missions de police administrative », à savoir la surveillance lors du déconfinement, constituait « une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée » (cf. CE, ordonnance du 18 mai 2020, n° 440442).

Ceci faisait suite à la saisine par l’association « La Quadrature du Net » et la Ligue des droits de l’homme demandant au juge des référés du tribunal administratif de Paris, de suspendre l’exécution de la décision du préfet de police ayant institué depuis le 18 mars 2020, un dispositif visant à capturer des images par drones et à les exploiter dans le but de faire respecter les mesures de confinement.

Le juge des référés a donc estimé que l’Etat devait cesser de procéder à des mesures de surveillance par drone tant que :

  • N’était pas entré en vigueur, un texte réglementaire, pris après avis de la CNIL, autorisant la création d’un traitement de données à caractère personnel,
  • Ou que la préfecture ne s’était pas dotée d’appareils dont les dispositifs techniques seraient « de nature à rendre impossible, quels que puissent en être les usages retenus, l’identification des personnes filmées».

Par son avis rendu public le 13 novembre 2020, le Conseil d’Etat est revenu sur cette question et a entendu préciser qu’un décret en Conseil d’État ne constituerait pas une base légale suffisante pour encadrer le recours à un tel traitement des données personnelles par des drones.

Il a en effet estimé qu’un drone est susceptible « par le survol rapproché et mobile de lieux publics ou de lieux privés qu’il permet, de porter atteinte à la liberté proclamée par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui implique le respect de la vie privée. » « Le procédé peut, par ailleurs, être utilisé aux fins de recueillir des preuves à l’appui de poursuites judiciaires et se rattache alors à la procédure pénale. »

Il revient donc au Législateur de « définir les conditions permettant d’assurer la conciliation entre le respect de la vie privée et la sauvegarde de l’ordre public, comme il l’a fait pour la vidéoprotection et les caméras individuelles ».

« Il lui incombera de préciser et d’encadrer leurs usages de manière à limiter les atteintes portées au respect de la vie privée. La loi devra désigner les autorités publiques et les personnes susceptibles d’avoir recours à cette technique de surveillance, comme les modalités de conservation et de destruction des enregistrements, lorsqu’ils seront autorisés ».