L’article L.2333-87-5 du Code général des collectivités territoriales, relatif à la procédure de recours contre le forfait de post-stationnement, est contraire à l’article 16 de la DDHC, le législateur n’ayant pas pris « les garanties de nature à assurer que l’exigence de paiement préalable ne porte pas d’atteinte substantielle au droit d’exercer un recours juridictionnel effectif »

Décision du Conseil Constitutionnel n°2020-855 (QPC) du 9 septembre 2020

L’article L. 2333-87-5 du CGCT conditionnait la recevabilité du recours contre une amende de stationnement à son règlement préalable. Plus précisément, il énonçait : « La recevabilité du recours contentieux contre la décision rendue à l’issue du recours administratif préalable obligatoire et contre le titre exécutoire émis est subordonnée au paiement préalable du montant de l’avis de paiement du forfait de post-stationnement et de la majoration prévue au IV de l’article L. 2333-87 si un titre exécutoire a été émis ».

Dans une décision en date du 10 juin 2020 (n°433276), le Conseil d’Etat  a été saisi d’un recours en annulation contre la décision de la Commission du contentieux du stationnement payant laquelle refusait d’annuler le titre exécutoire émis le 11 septembre 2018 par l’agence nationale de traitement automatisé des infractions en vue du recouvrement d’un forfait de post-stationnement mis à la charge du requérant par la commune de Nancy et de la majoration dont il est assorti.

Il a également été saisi d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) dans laquelle le requérant demandait le renvoi au Conseil Constitutionnel de la conformité de l’article L. 2333-87-5 du CGCT. Le Conseil d’Etat a estimé que le moyen soulevé était suffisamment sérieux afin de transmettre la QPC au juge constitutionnel.

A cet effet, le requérant soulevait le moyen selon lequel l’article L. 2333-87-5 du CGCT méconnaîtrait le droit à un recours juridictionnel effectif consacré à l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) aux termes duquel  » toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». 

Tout d’abord, le Conseil Constitutionnel a rappelé l’interprétation retenue dudit article 16 de la DDHC : « Il résulte de cette disposition qu’il ne doit pas être porté d’atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction ».

Il a ensuite exposé l’intention poursuivie par le législateur via l’obligation de paiement préalable à toute contestation de l’amende. A ce titre, cette condition de recevabilité répond à « un but de bonne administration de la justice » afin de « prévenir les recours dilatoires dans un contentieux exclusivement pécuniaire susceptible de concerner un très grand nombre de personnes ».

Cependant, le juge conclut à l’inconstitutionnalité de l’article L. 2333-87-5 du CGCT dans la mesure où :

  • D’une part, si l’article L. 2333-87 du même Code auquel renvoie la disposition contestée prévoit que le montant de l’amende ne peut excéder celui du forfait de post-stationnement, le juge constitutionnel a estimé « qu’aucune disposition législative ne garantit que la somme à payer pour contester des forfaits de post-stationnement et leur majoration éventuelle ne soit d’un montant trop élevé » ;
  • D’autre part, le texte ne prévoit « aucune exception tenant compte de certaines circonstances ou de la situation particulière de certains redevables ». Dès lors, en toutes circonstances, l’obligation de régler au préalable ledit forfait majoré de l’amende avant de pouvoir le contester devant la Commission du contentieux du stationnement payant s’appliquait.

Par conséquent, le Conseil constitutionnel considère qu’en adoptant une telle disposition, le législateur n’a pas pris « les garanties de nature à assurer que l’exigence de paiement préalable ne porte pas d’atteinte substantielle au droit d’exercer un recours juridictionnel effectif » de l’article 16 de la DDHC.

L’article L.2333-87-5 du CGCT est ainsi déclarée inconstitutionnelle, déclaration qui intervient à compter de la date de publication de la décision du Conseil constitutionnel, dans la mesure où aucun motif ne justifie de reporter la prise d’effet de la déclaration d’inconstitutionnalité, au sens de l’article 62 de la Constitution. Elle est ainsi applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.