Après la date d’entrée en fonction des conseillers municipaux et communautaires élus le 15 mars dernier, et l’installation des nouvelles municipalités, actuellement en cours, jusqu’au 28 mai, c’est le second tour du scrutin, initialement prévu le 22 mars, qui vient d’être fixé à la date du 28 juin prochain. Le Premier Ministre et le Ministre de l’Intérieur en ont fait l’annonce officielle lors d’une conférence de presse commune, tenue vendredi dernier à Matignon.

  • Le 28 juin, une date attendue mais non consensuelle

S’appuyant sur l’avis du Conseil scientifique rendu le 18 mai dernier, lequel ne s’est pas montré défavorable à la fixation d’une telle date, marquant ainsi un accord tacite, le Gouvernement a donc tranché, répondant au souhait des principales associations nationales d’élus. Il s’agit, pour reprendre les termes du Premier Ministre, évoquant les Communes et les intercommunalités, de préparer l’après crise sanitaire, celles-ci constituant « d’autant d’institutions qui, le moment venu, seront aux avant-postes de la relance ». Il a ainsi été rappelé par le Chef du Gouvernement, le rôle déterminant des collectivités locales dans la reprise de l’investissement public et la nécessité de leur attribuer des nouveaux exécutifs.

Décision a donc été prise alors même que, sur un plan politique, la fixation du second tour des élections municipales demeure assez loin de faire consensus. Certains partis politiques et même certaines personnalités relevant de la majorité, plaidaient, en effet, pour un report a minima à l’automne prochain, voire plus tardivement encore, à janvier ou mars 2021, avec notamment l’idée de coupler éventuellement le scrutin municipal avec les élections départementales.

  • Une date de scrutin éventuellement réversible

Si la date du second tour a été fixée au 28 juin prochain, l’exécutif n’a toutefois pas renoncé à devoir être contraint, une nouvelle fois, de reporter, le cas échéant, le scrutin en cas d’évolution défavorable de l’épidémie, suivant en cela l’avis du Conseil scientifique. Ce dernier n’avait, en effet, pas manqué de rappeler dans son avis qu’il était encore trop tôt pour évaluer le niveau de circulation du virus durant le mois de juin. Aussi, en fonction des estimations non encore disponibles à la date de rendu de son avis, il estimait que cette évaluation pourrait alors motiver, selon ses résultats, une nouvelle interruption du processus électoral.

Aussi, a-t-il été explicitement annoncé que la date du 28 juin restait réversible et qu’il était nécessaire de réévaluer la situation sanitaire 15 jours avant le scrutin. C’est la raison pour laquelle le Premier Ministre a annoncé qu’il y aura une clause de revoyure dans deux semaines environ, pour garder le temps nécessaire au Parlement d’examiner un éventuel nouveau report.

En outre, et afin d’envisager toutes les hypothèses, il a également été annoncé qu’un projet de loi serait déposé, à titre purement conservatoire, permettant d’organiser le report jusqu’en janvier 2021, si le Conseil scientifique devait préciser qu’il n’était plus possible d’organiser le scrutin le 28 juin prochain.

Un tel nouveau report ne serait pas sans conséquence majeure. S’il devait, en effet, intervenir, ce n’est pas un, mais bien deux tours de scrutin qu’il faudrait alors organiser. Le Conseil d’Etat, dans son avis du 18 mars dernier sur le projet de loi COVID, avait rappelé qu’à défaut de second tour avant l’été, « il appartiendra au aux pouvoirs publics de reprendre l’ensemble des opérations électorales dans les communes où les conseils municipaux sont incomplets ».

On ne pourra donc, dans un tel contexte, que souhaiter que les conditions sanitaires puissent permettre le bon déroulement de ce scrutin et faire en sorte que les 4 897 Communes non encore dotées d’un nouveau Conseil municipal, le soient désormais, permettant, par ailleurs, à l’ensemble des intercommunalités de se mettre, à leur tour, en ordre de marche, postérieurement à ce second tour des élections municipales et communautaires.

  • Des modalités de vote inchangées dans un contexte de sécurité sanitaire renforcé

Si le mode opératoire des procurations sera, à l’occasion de ce second tour, facilité, comme s’y sont engagés le Premier Ministre et le Ministre de l’Intérieur, rien n’a toutefois été précisé quant à la possibilité pour un même électeur de détenir plusieurs procurations.

De même, la dématérialisation des demandes de procuration tout comme le vote par correspondance resteront sans application, et ne pourront pas être mis en œuvre, pour des motifs de sécurité et de sincérité du vote.

Sur le plan sanitaire, le renforcement des règles sera de mise. Chaque électeur devra porter un masque de protection, tout comme les membres du bureau de vote et les scrutateurs, les masques étant fournis par les Communes avec le soutien plein et entier de l’Etat, comme l’a précisé le Ministre de l’Intérieur, autant de règles qui ne manqueront pas d’être posées et formalisées dans les tous prochains jours.

  • Une campagne électorale particulière

Le Conseil scientifique avait entendu attirer l’attention, dans son avis du 18 mai dernier, sur les effets prévisibles d’une campagne électorale, qui est, par principe, de nature à multiplier les contacts sociaux voire physiques. Exposant ainsi, selon lui, les personnes qui y participent à des risques renouvelés dans des conditions difficiles à sécuriser d’un point de vue sanitaire, et à accroître, ce faisant, un risque plus général de reprise de l’épidémie.

Face à cette alerte et pour tenter d’y répondre, le Gouvernement s’est engagé à consulter les organisations politiques afin de pouvoir adapter la campagne à la sécurité sanitaire, la campagne devant se faire « différemment », selon les termes du Ministre de l’Intérieur, avec de nécessaires précautions dans les contacts entre candidats et électeurs, la distanciation physique et les masques. Autant d’éléments qui devront tendre à privilégier une campagne d’abord et avant tout numérique.

Rappelant qu’en temps normal, une campagne de second tour ne dure qu’au maximum cinq jours, le Premier Ministre a entendu rappeler qu’à l’occasion de ce second tour, compte tenu des conditions spécifiques actuelles, la campagne électorale à intervenir serait sans doute de moindre intensité mais s’inscrirait, en revanche, davantage dans la durée.

Autrement dit, ce que la campagne perdrait en intensité, elle le gagnerait en durée… Gageons que les électeurs répondent présents à ce nouveau et inédit rendez-vous électoral et ne se détournent pas massivement des urnes, après un premier tour marqué, à l’échelle nationale, par une faible participation dans le contexte sanitaire que l’on sait…évitant ainsi les polémiques nées du maintien du premier tour…