Dans cet arrêt en date du 7 novembre 2019, le Conseil d’Etat revient sur les conséquences du retrait d’une compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) en précisant que « sauf accord contraire des parties, l’exécution de ces contrats se poursuit sans autre changement jusqu’à leur échéance ».

Conseil d’État, 7 novembre 2019, N° 431146

En l’espèce, la communauté de communes du canton de Criquetôt-l’Esneval était membre du syndicat mixte de traitement et de valorisation des déchets du pays de Caux (SMITVAD) auquel elle avait transféré ses compétences relatives à la maîtrise d’ouvrage et à l’exploitation de plateformes de valorisation et de traitement, d’usines de valorisation énergétique et de centres de stockage des déchets.

En 2010, ce syndicat mixte avait conclu, avec la société Valor-Caux, un bail emphytéotique administratif (BEA) et une délégation de service public (DSP) en vue de la création d’une unité de traitement des déchets ménagers et de deux installations de stockage de déchets.

Pour financer ces ouvrages, le syndicat mixte avait obtenu de la banque Dexia Crédit local un  » accord direct de financement  » par lequel il s’engageait à verser directement à la banque, à chacune de ses échéances, l’une des redevances dues au délégataire en exécution du contrat de délégation de service public.

Puis, par un arrêté du préfet de l’Eure du 19 octobre 2018, la communauté de communes du canton de Criquetôt-l’Esneval a été regroupée au 1er janvier 2019, par fusion, avec la communauté d’agglomération du Havre et avec une autre communauté de communes, toutes deux extérieures au SMITVAD, pour constituer une communauté urbaine dénommée  » Le Havre Seine Métropole « . La communauté urbaine étant compétente de plein droit, en vertu des dispositions de l’article L. 5215-20 du code général des collectivités territoriales, en matière de collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés, la communauté de communes du canton de Criquetôt-l’Esneval a été retirée du SMITVAD, en conséquence de cette fusion, par l’effet des dispositions de l’article L. 5215-22 du code général des collectivités territoriales.

Considérant que les contrats passés pour le compte de la communauté de communes du canton de Criquetôt-l’Esneval avaient été transférés, parallèlement au transfert de compétence, à la Communauté Urbaine « Le Havre Seine Métropole », le syndicat mixte de traitement et de valorisation des déchets du pays de Caux (SMITVAD) a demandé au tribunal administratif de Rouen de suspendre l’exécution de la décision du 22 février 2019 par laquelle le président de la communauté urbaine  » Le Havre Seine Métropole  » a rejeté sa demande tendant à ce que la communauté urbaine exécute certaines des obligations découlant de contrats passés par le syndicat dans l’exercice de sa compétence.   

Par une ordonnance n° 1901425 du 13 mai 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen a fait droit à cette demande et prononcé plusieurs injonctions à l’encontre de la Communauté urbaine.

Saisi d’un pourvoi par le «  » » venant aux droits de la Communauté urbaine, le Conseil d’Etat a rappelé que :

« Il résulte de la combinaison des dispositions du I, du II et du V de l’article L. 5215-22 que lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale est fusionné pour constituer une communauté urbaine alors qu’il est membre d’un syndicat mixte et que les communes membres de cet établissement public de coopération intercommunale fusionné sont associées, au sein de la communauté urbaine, avec des communes extérieures à ce syndicat, l’établissement public de coopération intercommunale fusionné est retiré du syndicat mixte, pour les compétences de ce syndicat correspondant aux compétences de plein droit de la communauté urbaine, dans les conditions prévues à l’article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales. « 

Ce faisant, et sur le fondement de l’article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales, le Conseil d’Etat valide le raisonnement du juge des référés du Tribunal administratif de Rouen en indiquant clairement que :

 » (…) dans l’hypothèse d’un retrait de la compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale, ses communes membres se trouvent de plein droit substituées à l’établissement pour l’ensemble des contrats en cours, quelle que soit leur nature, conclus par cet établissement pour l’exercice de cette compétence. Sauf accord contraire des parties, l’exécution de ces contrats se poursuit sans autre changement jusqu’à leur échéance, y compris durant la période précédant le partage des biens prévu par les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 5211-25-1. Il en va ainsi alors même que les contrats en cause porteraient sur des biens appartenant à l’établissement public de coopération intercommunale, sans qu’y fassent obstacle les règles particulières applicables à certains contrats, tels que les baux emphytéotiques administratifs. »