Par une ordonnance rendue le 3 septembre 2019, le juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative (référé suspension) a rappelé que la procédure disciplinaire était indépendante de la procédure pénale.

Conseil d’État, Juge des référés, 3 septembre 2019, n°434072

En l’espèce, le Maire d’une commune du Pas-de-Calais, visé par plusieurs procédures pénales ouvertes par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer (prise illégale d’intérêts et complicité de faux en écriture publique) a été révoqué de ses fonctions par décret du 21 août 2019 pris par le Ministre de l’Intérieur, sur le fondement des dispositions de l’article L.2122-16 du code général des collectivités territoriales, lesquelles disposent que :

« Le maire et les adjoints, après avoir été entendus ou invités à fournir des explications écrites sur les faits qui leur sont reprochés, peuvent être suspendus par arrêté ministériel motivé pour une durée qui n’excède pas un mois. Ils ne peuvent être révoqués que par décret motivé pris en conseil des ministres.

Le recours contentieux exercé contre l’arrêté de suspension ou le décret de révocation est dispensé du ministère d’avocat.

La révocation emporte de plein droit l’inéligibilité aux fonctions de maire et à celles d’adjoint pendant une durée d’un an à compter du décret de révocation à moins qu’il ne soit procédé auparavant au renouvellement général des conseils municipaux. »

L’élu sollicitait la suspension du décret du 21 août 2019 prononçant sa révocation en invoquant notamment le fait que cette révocation méconnaîtrait le principe « non bis in idem« , mais aussi le principe de la présomption d’innocence et du respect des droits de la défense dès lors qu’il n’a pas encore été jugé, et que la décision de révocation est fondée sur de simples mises en examen et des prétendus agissements.

Tel n’est pas l’avis du juge des référés du Conseil d’Etat, lequel a jugé que :

 » (…) la procédure disciplinaire est indépendante de la procédure pénale. Par suite, l’autorité administrative ne méconnaît pas le principe de la présomption d’innocence, y compris dans l’hypothèse où c’est à raison des mêmes faits, étrangers ou non à l’exercice des fonctions de maire, que sont engagées parallèlement les deux procédures, en prononçant une sanction sans attendre que les juridictions répressives aient définitivement statué.

7. D’une part, il ressort des pièces du dossier que le requérant est visé par plusieurs procédures pénales ouvertes par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer. Il est en particulier mis en examen pour prise illégale d’intérêts et complicité de faux en écriture publique. Il est également cité à comparaître devant le tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer le 12 septembre 2019 pour détournement de fonds publics.

8. D’autre part, il ressort des pièces du dossier que, dans son rapport du
30 janvier 2019 portant observations définitives sur la gestion de la commune d’Hesdin durant les exercices 2013 et suivants, la chambre régionale des comptes a relevé  » une situation très critique du pilotage de l’administration communale, devenu chaotique à bien des égards  » et de graves dysfonctionnements de cette administration sous la conduite de son maire, notamment dans le domaine de la gestion financière et de la passation des marchés publics. En outre, les irrégularités relevées concernant certains de ceux-ci ont conduit le procureur financier de cette chambre à saisir le procureur de la République. « 

Ainsi, en l’absence de moyens de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision dont la suspension est demandée, la requête de l’élu révoqué est rejetée.