Le Tribunal administratif de Lyon a jugé que la cristallisation des règles d’urbanisme applicables par la délivrance d’une déclaration préalable ne fait pas obstacle à ce que soit opposé un sursis à statuer contre une demande de permis de construire, si, au moment de la délivrance de la déclaration préalable, les conditions pour opposer un sursis à statuer étaient réunies.

Tribunal administratif de Lyon, 10 décembre 2020, n° 1905421

Il est rappelé que les dispositions de l’article L. 153-11 du code de l’urbanisme encadrent la possibilité d’opposer un sursis à statuer à une demande d’autorisation d’urbanisme lors de l’élaboration d’un nouveau document d’urbanisme :

« L’autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l’article L. 424-1, sur les demandes d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan dès lors qu’a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durable ».

Les dispositions de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme, quant à elles, posent le principe selon lequel la délivrance d’une déclaration préalable créant un lotissement cristallise les règles d’urbanisme applicables :

« Lorsque le lotissement a fait l’objet d’une déclaration préalable, le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme nouvelles intervenues depuis la date de non-opposition à la déclaration préalable, et ce pendant cinq ans à compter de cette même date ».

Dans cette affaire, un arrêté de non-opposition à déclaration préalable portant division a été pris le 12 avril 2018 ; cette décision n’a pas été contestée, et aurait du avoir pour effet de cristalliser les règles d’urbanisme applicables pour cinq ans.

Le 5 janvier 2019, un permis de construire tacite a été délivré pour la construction d’une maison individuelle avec piscine sur une parcelle issue de la division, à une date à laquelle le futur PLU-H n’avait toujours pas été adopté.

Ce permis de construire a été contesté, et les requérants faisaient valoir, par la voie de l’exception d’illégalité, que le maire aurait dû opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire, dès lors qu’il aurait également dû opposer un sursis à statuer à la déclaration préalable portant division, et qu’ainsi la déclaration préalable n’avait pas eu pour effet de cristalliser les droits à construire.

Le Tribunal administratif de Lyon va suivre le raisonnement des requérants en jugeant que :

« Il résulte par ailleurs de ces dispositions que l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme ne fait pas obstacle, par lui-même, à ce que la demande de permis de construire déposée dans les cinq ans suivant l’achèvement d’un lotissement fasse l’objet du sursis à statuer prévu par l’article L. 424-1 du même code, sous réserve que soient remplies, à la date de la non-opposition à la déclaration préalable de division, les conditions énumérées à l’article L. 153-11 du code de l’urbanisme pour opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis de construire ». 

Ainsi, et malgré l’existence d’une déclaration préalable cristallisant les règles d’urbanisme applicables, un sursis à statuer peut être opposé à l’encontre d’une demande de permis de construire, si, au moment de la délivrance de la déclaration préalable, la double condition que l’octroi de l’autorisation d’urbanisme soit susceptible de compromettre l’exécution du projet de PLU et que ce dernier ait atteint un état d’avancement suffisant est remplie.

Au cas de l’espèce, le projet de PLU-H de la Métropole de Lyon a été arrêté le 11 septembre 2017, mais n’était pas encore en vigueur et le Tribunal a considéré qu’à la date de délivrance de la déclaration préalable créant le lotissement, le 22 avril 2018, la condition de l’état d’avancement du document d’urbanisme était remplie.

Le terrain d’assiette du projet, sous l’empire de l’ancien document d’urbanisme, ne comprenait ni EBC ni EVV, mais le projet de PLU-H arrêté classait la moitié de la parcelle en EBC et un quart de celle-ci en EVV. Dès lors, le projet de construction sollicité, impliquant la suppression d’au moins deux arbres situés au sein de l’EBC identifié par le projet de PLU-H, était de nature à compromettre la conservation et la protection de l’EBC créé.

Le Tribunal de Lyon a ainsi estimé qu’en « n’opposant pas un sursis à statuer à la demande de permis de construire du 5 novembre 2018, le maire de Rilleux-la-Pape a commis une erreur manifeste d’appréciation ».