Dans une décision QPC du 11 juin 2021, le Conseil constitutionnel a censuré, pour violation du droit au respect de la vie privée, les dispositions issues de l’ordonnance du 25 novembre 2020 prévoyant la communication à l’administration des informations médicales nécessaires à l’examen des droits au congé de maladie imputable au service des fonctionnaires.

 

 

Conseil constitutionnel, 11 juin 2021, n° 2021-917 QPC

 

 

Le Conseil constitutionnel était saisi par l’Union nationale des syndicats autonomes de la fonction publique d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la rédaction du VIII de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires issue de l’ordonnance du 25 novembre 2020, aux termes duquel :

 

« I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (…)

VIII.- Nonobstant toutes dispositions contraires, peuvent être communiqués, sur leur demande, aux services administratifs placés auprès de l’autorité à laquelle appartient le pouvoir de décision et dont les agents sont tenus au secret professionnel, les seuls renseignements médicaux ou pièces médicales dont la production est indispensable pour l’examen des droits définis par le présent article. »

 

 

L’Union requérante soutenait que de telles dispositions méconnaissaient le droit au respect de la vie privée protégée par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ainsi que la protection des données à caractère personnel.

 

 

Le Conseil a considéré que si le législateur avait poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de bon usage des deniers publics en permettant à l’administration de vérifier que l’ouverture du droit au congé de maladie imputable au service était conforme aux conditions légales, les dispositions en cause portaient une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée des agents dès lors que :

 

« (…) les renseignements dont les services administratifs peuvent obtenir communication des tiers sont des données de nature médicale, qui peuvent leur être transmises sans recueillir préalablement le consentement des agents intéressés et sans que le secret médical puisse leur être opposé.

 

  1. Or, d’une part, ce droit de communication est susceptible d’être exercé par les « services administratifs » placés auprès de l’autorité à laquelle appartient le pouvoir d’accorder le bénéfice du congé. Ainsi, en fonction de l’organisation propre aux administrations, ces renseignements médicaux sont susceptibles d’être communiqués à un très grand nombre d’agents, dont la désignation n’est subordonnée à aucune habilitation spécifique et dont les demandes de communication ne sont soumises à aucun contrôle particulier.

 

  1. D’autre part, les dispositions contestées permettent que ces renseignements soient obtenus auprès de toute personne ou organisme. »

 

 

Il appartiendra au législateur de prévoir un dispositif qui, tout en poursuivant l’objectif de valeur constitutionnelle de bon usage des deniers publics, respecte la vie privée des fonctionnaires en restreignant à la fois les agents susceptibles d’obtenir communication des données médicales mais également les organismes susceptibles de les fournir.

 

 

Le Conseil constitutionnel a en conséquence déclaré inconstitutionnel le paragraphe VIII de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 à compter de la date de publication de la décision.

 

 

L’inconstitutionnalité de ces dispositions s’appliquera donc à toutes les affaires non jugées définitivement à compter du 12 juin 2021, date de sa publication au Journal Officiel.