La Cour administrative de Bordeaux a jugé qu’une carte d’aléa de mouvements de terrain, publiée sur le site internet de la préfecture, avec une mention selon laquelle cette carte doit être immédiatement prise en compte pour la planification et les autorisations d’urbanisme, oriente les autorités compétentes dans l’instruction de telles autorisations et a donc le caractère de lignes directrices. En raison des effets notables de cette carte, le recours en excès de pouvoir est ouvert.

 

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 21 juin 2021, n° 19BX00650

 

À l’origine de cette affaire, les propriétaires d’un terrain ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler la décision implicite née le 18 septembre 2017 par laquelle la préfète de Lot‑et‑Garonne a refusé de modifier la carte d’aléa glissement de terrain inscrivant leur parcelle en zone d’aléa fort.

 

Par un jugement du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

 

Saisie en appel, la Cour administrative de Bordeaux rappelle en premier lieu que la parcelle des appelants était classée, par le plan de prévention des risques de mouvements de terrain (PPRMT) en zone d’aléa moyen. À la suite d’un référé-expertise devant le tribunal administratif de Bordeaux, l’expertise concluait à un classement en aléa faible voire moyen.

 

Dès lors, les propriétaires ont demandé à la préfète de Lot‑et‑Garonne de modifier la carte d’aléa glissement de terrain en conséquence. C’est son silence qui a fait naitre la décision implicite du 18 septembre 2017.

 

Ensuite, en deuxième lieu, la Cour va faire une application positive de la décision GISTI du Conseil d’État (CE, 12 juin 2020, n° 418142) et rappelle que :

« Les documents de portée générale émanant d’autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices. Il appartient au juge d’examiner les vices susceptibles d’affecter la légalité du document en tenant compte de la nature et des caractéristiques de celui-ci ainsi que du pouvoir d’appréciation dont dispose l’autorité dont il émane […] ».

 

En troisième et dernier lieu, les juges administratifs ont considéré que la carte d’aléa mouvements de terrain orientait les autorités compétentes dans l’instruction des autorisations d’urbanisme et avait donc le caractère de lignes directrices. La Cour a considéré que cette carte ne constituait pas, en l’absence de révision du plan de prévention des risques, un document préparatoire.

 

Dans ces conditions, le recours en excès de pouvoir est ouvert contre les cartes d’aléas publiées par les préfectures.