Prévue par les dispositions de l’article L.5211-9-2 du CGCT, la problématique du transfert des pouvoirs de police spéciale aux Présidents des EPCI à fiscalité propre (Communautés de communes, d’agglomération, urbaine et Métropole) mérite quelques rappels… et ce, alors même que le délai dont disposaient les Maires pour s’opposer audit transfert ou à la reconduction de ces pouvoirs de police à l’exécutif de l’EPCI vient tout juste d’expirer.

Retour en détail sur le dispositif applicable et les conséquences de l’absence d’opposition des Maires.

 

Exclusion des pouvoirs de police administrative générale

D’emblée, rappelons que seuls certains pouvoirs de police spéciale sont concernés par le mécanisme de transfert au profit du Président de l’EPCI. Les pouvoirs de police administrative générale détenus par le Maire, en application des articles L.2212-1 et L.2212-2 du CGCT, sont exclus de ce dispositif et ne peuvent d’ailleurs jamais faire l’objet d’un transfert à une quelconque autre entité.

 

Transferts automatiques et transferts facultatifs

Rappelons, tout d’abord, que le dispositif instauré par le CGCT prévoit :

  • D’une part, des transferts automatiques de certains pouvoirs de police, lesquels interviennent par principe, sauf opposition formulée par les Maires, dans les conditions prévues par le texte (conditions qui seront détaillées ci-après),

 

  • D’autre part, des transferts facultatifs de certains pouvoirs de police, lesquels n’interviennent que sur proposition d’un ou plusieurs Maires et sous réserve, là-encore, de respecter certaines conditions (conditions que nous évoquerons ci-dessous).

 

Ces transferts de pouvoirs de police interviennent lorsque les compétences en lien avec ces derniers sont transférées à l’EPCI. L’objectif étant de regrouper, sur la même entité, l’exercice des missions en lien avec l’exercice d’une compétence et les pouvoirs de police afférents.

 

Transferts automatiques : polices concernées et procédure de transfert

  1. Pouvoirs de police spéciale concernées par le mécanisme de transfert automatique

Cinq domaines de compétences sont concernés par le mécanisme de transfert automatique des pouvoirs de police afférents.

  • En matière d’assainissement, le transfert de police spéciale au profit du Président de l’EPCI à fiscalité propre concerne l’ensemble des attributions permettant de réglementer cette activité.

 

  • En matière de collecte des déchets ménagers, là-encore, le transfert des pouvoirs de police spéciale concerne l’ensemble des attributions permettant de réglementer cette activité. Cependant, lorsque les Communes sont membres d’un EPCI à fiscalité propre (CC, CA, CU, Métropole) lui-même membre d’un Syndicat mixte, pour l’exercice de cette compétence, le transfert des pouvoirs de police s’effectue directement au profit du Président du Syndicat.

 

  • En matière de réalisation d’aires d’accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, le transfert de police spéciale au profit du Président de l’EPCI à fiscalité propre concerne l’ensemble des attributions dans ce domaine de compétence.

 

  • En matière de voirie, les pouvoirs de police spéciale transférés concernent, d’une part, la police de la circulation et du stationnement, et d’autre part, les attributions relatives à la délivrance des autorisations de stationnement sur la voie publique aux exploitants de taxis.

 

  • En matière d’habitat, les pouvoirs de polices transférés concernent la procédure de péril des édifices menaçant ruine, la sécurité dans les établissements recevant du public à usage total ou partiel d’habitation et la sécurité des immeubles collectifs à usage principal d’habitation. Etant précisé, ici, que le transfert vise nécessairement l’ensemble des pouvoirs de police, lesquels ne peuvent être dissociés.

 

 

  1. Procédure de transfert automatique des pouvoirs de police spéciale

Deux cas de figure doivent, tout d’abord, être distingués.

 

Le premier cas concerne l’hypothèse dans laquelle la compétence donnant lieu au transfert automatique des pouvoirs de police vient d’être transférée à l’EPCI.

Dans cette première hypothèse, les Maires peuvent s’opposer au transfert des pouvoirs de police dans un délai de six mois suivant la date de transfert de la compétence. A cette fin, ils notifient leur opposition au Président de l’établissement ou du groupement. Il est alors mis fin au transfert pour les Communes dont les Maires ont notifié leur opposition.

Ainsi, dans cette première hypothèse, le transfert de compétence s’accompagne automatiquement du transfert des pouvoirs de police afférents. Les Maires peuvent, cependant, dans les six mois suivants le transfert de compétence, s’opposer au transfert des pouvoirs de police en lien avec la compétence transférée. Si tel est le cas, les pouvoirs de police sont de nouveau exercés par le ou les Maires qui se sont opposés au transfert.

 

Le second cas concerne l’hypothèse de l’élection d’un nouveau Président.

 

Dans ce second cas, deux sous-hypothèses doivent être distinguées :

 

  • Première sous-hypothèse : l’ancien Président exerçait l’un des pouvoirs de police spéciale sur tout ou partie du territoire

Dans ce cas, les Maires des Communes concernées pouvaient s’opposer à la reconduction du transfert de ce pouvoir dans un délai de six mois suivant la date de l’élection du Président. La notification de cette opposition au Président met fin au transfert.

 

  • Seconde sous-hypothèse : l’ancien Président n’exerçait pas l’un des pouvoirs de polices spéciale

Dans ce cas, les Maires des Communes concernées pouvaient s’opposer au transfert de ce pouvoir dans un délai de six mois suivant la date de l’élection du Président. Le transfert n’a donc pas lieu dans une telle hypothèse.

 

Soulignons, ici, que l’article 17 de la loi n° 2020-760 du 22 juin 2020 tendant à sécuriser l’organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires a fixé la date de la première réunion de l’organe délibérant au 17 juillet 2020. En conséquence, les Présidents d’EPCI ont été élus, au plus tard, le 17 juillet 2020. Ainsi, le délai de six mois précité expirait au plus tard le 17 janvier 2021.

 

  1. Faculté de renonciation du Président de l’EPCI

Le Président de l’EPCI peut, dans certaines hypothèses, renoncer à ce que les pouvoirs de police spéciale susvisés lui soient transférés.

Ainsi, si un ou plusieurs Maires se sont opposés au transfert de leurs pouvoirs de police, le Président peut renoncer à ce que les pouvoirs de police spéciale lui soient transférés de plein droit. Cette renonciation doit intervenir dans un délai d’un mois suivant la fin de la période pendant laquelle les Maires sont susceptibles de faire valoir leur opposition. Il notifie sa renonciation à chacun des Maires des Communes membres. Dans ce cas, le transfert des pouvoirs de police n’a pas lieu ou prend fin à compter de cette notification.

Cependant, relevons que le Président ne peut pas renoncer à ce que les pouvoirs de police susvisés lui soient transférés, sauf si au moins la moitié des Maires se sont opposés au transfert de plein droit, ou si les Maires s’opposant à ce transfert représentent au moins la moitié de la population de l’établissement.

 

  1. Un transfert possible même après une éventuelle opposition

Les Maires qui s’opposent au transfert peuvent, par la suite, transférer à tout moment les pouvoirs de police susvisés au Président de l’EPCI. Dans ce cas, le transfert prend effet dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision du Maire au Président, sauf si le Président notifie au Maire, dans ce délai, son refus d’exercer ces pouvoirs.

Le Président ne peut refuser le transfert de ces pouvoirs de police que s’il n’exerce pas déjà de tels pouvoirs sur le territoire d’une ou plusieurs communes membres.

 

Transferts facultatifs : polices concernées et procédure de transfert

 

  1. Pouvoirs de police spéciale concernées par le mécanisme de transfert facultatif

Trois domaines de compétences sont concernés par le mécanisme de transfert facultatif des pouvoirs de police afférents.

Ces domaines sont les suivants :

  • Les prérogatives relatives à la sécurité pour assurer la sécurité des manifestations culturelles et sportives organisées dans des établissements communautaires,
  • Les attributions lui permettant de réglementer cette activité lorsque l’EPCI à fiscalité propre est compétent en matière de défense extérieure contre l’incendie,
  • Les prérogatives relatives à la lutte contre les dépôts sauvages, découlant de l’article L. 541-3 du code de l’environnement, lorsque l’EPCI est compétent en matière de collecte des déchets ménagers.

 

  1. Procédure de transfert facultatif des pouvoirs de police spéciale

Le transfert facultatif des pouvoirs de police spéciale susvisés intervient sur proposition d’un ou de plusieurs Maires de Communes intéressées. Il ne peut avoir lieu qu’après accord de tous les Maires des Communes membres et du Président de l’EPCI. Le transfert est ensuite décidé par arrêté préfectoral. Il y est mis fin dans les mêmes conditions.

Relevons que les Communautés urbaines bénéficient d’un régime particulier. En effet, pour ces dernières, le transfert est décidé par arrêté préfectoral après accord du Président et des deux tiers au moins des Maires de Communes membres dont la population représente plus de la moitié de la population totale, ou de la moitié des Maires de Communes membres dont la population représente plus des deux tiers de la population totale.

De même, s’agissant des pouvoirs de police spéciale en matière de défense extérieure contre l’incendie, notons que les Présidents des Métropoles détiennent, par principe, les pouvoirs de police en la matière (article L.5217-3 du CGCT).