Dans deux arrêts récents, le Conseil d’Etat apporte un éclairage sur les motifs susceptibles d’engager la responsabilité de l’Etat en cas de licenciement illégal d’un salarié protégé.

CE, 4 novembre 2020, n ° 428741

La société Novopac employait un salarié protégé mais avait été autorisée par l’inspection du travail section du Rhône à le licencier.

Par son arrêt du 6 juin 2013, la Cour administrative d’appel de Lyon a confirmé l’analyse des juges de première instance, en estimant que la décision de licenciement illégale devait être annulée.

En effet, les juges ont retenu que l’administration n’avait pas vérifié la réalité du motif économique du secteur auquel appartenait ce salarié avant d’autoriser son licenciement.

L’annulation de cette décision de licenciement illégale a conduit à la condamnation de l’employeur au versement d’une indemnité a son ancien salarié.

L’employeur a donc recherché la responsabilité de l’Etat pour avoir pris une décision autorisant à tort, le licenciement de ce salarié.

Saisi d’un pourvoi en cassation, la Haute juridiction a précisé que la Cour administrative d’appel a commis en réalité deux erreurs de droit s’agissant de :

  • La condamnation de l’employeur à verser une indemnité au salarié protégé licencié sans cause réelle et sérieuse, qui peut avoir un lien direct suite à l’annulation par le juge administratif de l’autorisation administrative de licencier ce salarié protégé.
  • L’étendue de la responsabilité de l’Etat qui peut être exonéré en cas de faute de l’employeur. En l’espèce, « la cour administrative d’appel de Lyon, en se fondant, pour juger que la société Novopac avait commis une faute de nature à exonérer l’Etat de la moitié de la responsabilité encourue, sur le seul fait que la société avait pris acte devant le conseil des prud’hommes que, selon son arrêt du 6 juin 2013, l’autorisation était illégale pour un motif de fond, et qu’elle n’entendait pas se pourvoir en cassation contre cet arrêt, la cour a commis une erreur de droit et, par suite, entaché son arrêt d’inexacte qualification juridique des faits».

Le Conseil d’Etat a donc annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon du 7 janvier 2019 n° n° 17LY03026 sur ces deux motifs et renvoyé l’affaire au fond.

CE, 4 novembre 2020, n° 428191

La société LIDL employait un salarié protégé et a sollicité l’autorisation de le licencier pour inaptitude physique.

Cette demande a été refusée par deux décisions de l’inspection du travail le 30 août 2010 et du Ministre chargé du travail le 9 février 2011, au motif que la société n’avait pas satisfait à son obligation de recherche sérieuse en vue du reclassement de ce salarié.

Un jugement du tribunal administratif de Lille a toutefois annulé ces deux décisions au motif qu’elles étaient entachées d’un vice de procédure conduisant la société à se voir privé d’une garantie.

La société requérante a donc recherché la responsabilité de l’Etat du fait de l’illégalité du refus d’autorisation de licenciement de ce salarié protégé, sa demande a néanmoins été rejetée par le Tribunal administratif par un jugement du 30 décembre 2015, confirmé par la Cour administrative d’appel du 20 décembre 2018.

Il ressort de l’arrêt d’appel que pour rejeter la demande de la société Lidl, les juges du fond ont estimé que le refus d’autoriser le licenciement était illégal suite à un vice de procédure, sans pour autant se prononcer sur le bien-fondé de cette décision.

Partant, la Cour administrative d’appel de Douai en ne recherchant pas « si en l’espèce l’autorité administrative aurait pu légalement, en suivant une procédure régulière, rejeter la demande d’autorisation qui lui était soumise », a commis une erreur de droit.

Il est en effet constant que le refus d’autoriser le licenciement s’il s’avère illégal, est de nature à engager la responsabilité de l’Etat à l’égard de l’employeur subissant un préjudice direct et certain.