Le Conseil constitutionnel a prononcé une non conformité partielle de la loi de programmation 2018-2022 et réforme pour la justice.

Décision n°2019-778 du 21 mars 2019 : Loi de programmation 2018-2022 et réforme pour la justice

Le Conseil constitutionnel a ainsi notamment censuré:

– L’article 7 de la loi sur la révision des pensions alimentaires par les Caisses d’allocations familiales au motif que le législateur a autorisé une personne privée en charge d’un service public, que sont les CAF, à modifier des décisions judiciaires sans que ce pouvoir soit assorti de garanties suffisantes au regard des exigences d’impartialité découlant de l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

– Certaines dispositions de l’article 33 au motif que celui-ci généralise et rend obligatoire une restriction tendant à ce que la copie délivrée aux tiers des jugements prononcés publiquement soit limitée au dispositif du jugement lorsque celui-ci a été rendu après débats en chambre du conseil, sans que cette restriction soit limitée au cas où elle serait justifiée. Ces dispositions méconnaissent l’article 16 de la DDHC.

– L’article 37 relatif à la réduction du champ des incompatibilités des magistrats administratifs avec des fonctions administratives antérieures au motif que la suppression des cas d’incompatibilité permettant à un magistrat administratif ayant exercé les fonctions de directeur régional ou départemental d’une administration publique de l’État ou de direction dans l’administration d’une collectivité territoriale, autre que celle de directeur général des services d’une collectivité de plus de 100 000 habitants, dans le ressort d’un tribunal administratif ou d’une cour administrative d’appel, d’être nommé membre de ce tribunal ou de cette cour sans prévoir de condition de délai était contraire à la constitution.

– De certaines dispositions de l’article 44 qui prévoient un recours à des techniques spéciales d’enquête (interception, enregistrement et transcription de correspondances émises par la voie des communications électroniques) au motif que celles-ci ne seraient pas assorties des garanties permettant un contrôle suffisant par le juge du maintien du caractère nécessaire et proportionné de ces mesures durant leur déroulé.

– De certaines dispositions de l’article 46 s’agissant des interceptions de correspondances émises par la voie de communications électroniques alors que celles-ci peuvent se poursuivre sans contrôle, ni intervention d’un magistrat du siège, pendant 24 heures. Le Conseil constitutionnel considère qu’il est porté atteinte au droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances.

– De certaines dispositions de l’article 47 relatives aux réquisitions sans autorisation du procureur de la République lesquelles méconnaissent l’exigence de direction et de contrôle de l’autorité judiciaire sur la police judiciaire résultant de l’article 66 de la constitution.

– De certaines dispositions de l’article 49 modifiant le délai pendant lequel il peut être conduit une enquête de flagrance au motif que lesdites dispositions n’ont pas prévu des garanties légales de nature à assurer une conciliation équilibrée entre, d’une part, l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions et, d’autre part, le droit au respect de la vie privée et l’inviolabilité du domicile.

– De certaines dispositions de l’article 49 permettant au procureur de la République d’autoriser les agents chargés de procéder à la comparution d’une personne à pénétrer dans un domicile après six heures et avant vingt-et-une heures. Le Conseil constitutionnel a considéré que de telles dispositions n’assuraient pas une conciliation équilibrée entre la recherche des auteurs d’infractions et le droit à l’inviolabilité du domicile

– De certaines dispositions de l’article 54 relatif à la suppression de l’obligation de l’accord de l’intéressé pour le recours à des moyens de télécommunication audiovisuelle s’agissant des débats relatifs à la prolongation d’une mesure de détention provisoire. La juridiction considère qu’eu égard à l’importance de la garantie qui s’attache à la présentation physique de l’intéressé devant le magistrat ou la juridiction compétent, dans le cadre d’une procédure de détention provisoire, les dispositions contestées portent une atteinte excessive aux droits de la défense.

– De l’article 58 en matière d’amende forfaitaire au motif que deux personnes ayant commis une même infraction seraient susceptibles d’être soumises à une règle différente selon que l’autorité de poursuite aura choisi de prononcer une amende forfaitaire ou qu’elle aura choisi une autre voie de poursuite, qui laisse le juge libre de fixer la peine en considération des circonstances propres à chaque espèce.

– De certaines dispositions de l’article 103 relatif aux conditions dans lesquelles un magistrat peut assurer un renforcement temporaire et immédiat au sein d’une autre juridiction que la sienne relevant du même ressort de cour d’appel. Le Conseil constitutionnel a jugé que de telles dispositions mettaient en cause le statut des magistrats et relevaient donc d’une loi organique.