A l’occasion d’un arrêt en date du 27 septembre 2021, le Conseil d’Etat est venu rappeler avec rigueur, le contenu et le formalisme attendus d’un mémoire en réclamation. Il a ainsi jugé que la motivation du mémoire par simple référence à un document antérieurement transmis à l’acheteur, mais non joint à celui-ci, ne permet pas de qualifier ce mémoire de réclamation au sens du CCAG Travaux 2009.

 Conseil d’Etat, 27 septembre 2021, Commune de Bobigny, n° 442555

 

 

Dans cette affaire, le titulaire du marché de restructuration de la Maison de la Culture de la Commune de Bobigny, confronté à des difficultés d’exécution, a adressé à l’acheteur, une demande de rémunération complémentaire.

 

Faisant suite à ce courrier, la Commune lui a notifié le projet de décompte général du marché, aussitôt contesté par le titulaire à l’occasion d’un mémoire. La demande de rémunération complémentaire était réitérée dans ce document par référence au premier courrier adressé à la Commune, sans qu’il ne soit toutefois joint au mémoire.

 

Face au silence de la Commune suite à la réception de ce second courrier, le titulaire du marché a saisi le juge administratif.

 

Le Conseil d’Etat, à l’occasion de l’arrêt commenté, est venu rappeler, dans un considérant de principe, que pour que le mémoire du titulaire d’un marché public de travaux puisse être considéré comme une réclamation au sens de l’article 51.1.1 du CCAG Travaux 2009 applicable au marché en cause, il est indispensable :

 

  • D’une part, qu’il « comporte l’énoncé d’un différend» ;
  • Et d’autre part, « expose de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation» en indiquant tant les montants des sommes dont le paiement est demandé que les motifs de ces demandes. Sur ce dernier point, le Conseil d’Etat ajoute que le titulaire du marché doit « notamment communiquer les bases de calcul des sommes réclamées ».

 

Ayant rappelé le contenu indispensable d’un mémoire en réclamation, la Haute juridiction s’attarde ensuite sur le formalisme que doit revêtir ce document et précise que « si ces éléments ainsi que les justifications nécessaires peuvent figurer dans un document joint au mémoire, celui-ci ne peut pas être regardé comme une réclamation lorsque le titulaire se borne à se référer à un document antérieurement transmis au représentant du pouvoir adjudicateur ou au maître d’œuvre sans le joindre à son mémoire ».

 

Le Conseil d’Etat s’est donc livré à une interprétation très stricte de l’article 50.1.1 du CCAG Travaux 2009 repris d’ailleurs à l’identique par l’article 55.1.1 du CCAG Travaux issu de l’arrêté du 30 mars 2021, lequel prévoit que le mémoire doit reprendre, « sous peine de forclusion, les réclamations formulées antérieurement à la notification du décompte général et qui n’ont pas fait l’objet d’un règlement définitif » (voir notamment CAA Lyon, 24 septembre 2020, n° 20LY00608).

 

En l’espèce, en se bornant à faire référence à sa demande de rémunération complémentaire adressée en cours d’exécution du marché et faute d’avoir produit à l’appui de son mémoire cette précédente lettre, le Conseil d’Etat estime que la réclamation du titulaire ne pouvait être regardée « comme remplissant les exigences énoncées à l’article 50.1.1 du CCAG Travaux » précité et devait par conséquent, être rejetée.